mardi 30 septembre 2008

La prison aux Etats-Unis : la santé.

A leur sortie de prison ou de maison d’arrêt, les repris de justice américains reçoivent entre 2 et 200 dollars de « gate money » (argent de sortie) pour les aider à redémarrer, leurs vêtements et un billet d’autocar pour rallier la ville où ils sont tenus de résider. Mais bon nombre d’entre eux sortent de détention avec un tout autre bagage : sur les quelque 9 millions de détenus libérés au cours de l’année 2002, plus de 1,3 million étaient porteurs du virus de l’hépatite C, 137 000 étaient contaminés par le virus du sida (VIH) et 12 000 avaient la tuberculose. Ces chiffres - fournis par la Commission nationale sur la santé pénitentiaire - représentent respectivement 29 %, 13 % à 17 % et 35 % du nombre total d’Américains touchés par ces maladies. Depuis des années, les chercheurs en santé publique sonnent l’alarme : l’épidémie d’incarcération qui balaye le pays s’accompagne d’une « incubation massive » de maladies infectieuses dans les centres de détention.

Ces chiffres, impressionnants, n’ont rien de surprenant. Nombre de comportements qui valent d’être jeté en prison - l’injection de drogues, la prostitution ou la violence contre les personnes - sont également des vecteurs de ces maladies à transmission sexuelle ou sanguine. Il s’ensuit qu’un banal coup de filet policier se traduit par l’arrestation de personnes gravement malades ou en passe de le devenir. Une fois celles-ci jetées derrière les barreaux, les comportements à risques perdurent, mais sans le minimum de protections éventuellement prises à l’extérieur : puisque les rapports homosexuels, les drogues et la violence contreviennent à la loi dans les prisons, tout matériel lié à ces pratiques - seringues, aiguilles, eau de Javel, préservatifs ou protections de latex - relève de la contrebande (même de l’eau propre pour le rinçage du matériel est difficile à obtenir).

Résultat, un système de débrouille de la part des détenus, qui entraîne une pénurie de matériel d’injection et, partant, le partage généralisé des « seringues » de fortune (bricolées à partir de cartouches d’encre, de pailles et de cordes de guitare). En l’absence de préservatifs, les rapports sexuels, forcés ou consentis, se font couramment sans protection. En outre, le tatouage et le piercing, activités relativement à l’abri du danger de transmission du VIH ou de l’hépatite C dans les officines commerciales, deviennent des pratiques à haut risque en milieu carcéral. En effet, elles y sont interdites par la loi et le matériel nécessaire y est strictement proscrit ; il est donc précieusement conservé en secret et partagé par les détenus.
La décoration corporelle est une activité fortement valorisée et hautement ritualisée chez les détenus, pour qui « le tatouage crée des représentations permanentes de l’identité qui ne peuvent être confisquées par les autorités ; elles sont autant d’affirmations positives de soi dans un environnement foncièrement négatif ». Elle est aussi un moyen de signaler visuellement l’affiliation de chacun à tel gang ou telle clique, et donc de se distinguer parmi une foule d’individus anonymes et interchangeables. Illégales en prison, les activités impliquant l’usage d’aiguilles s’opèrent donc dans la clandestinité et sont, pour cette raison, sous-déclarées. Les chercheurs estiment toutefois que le tatouage concerne un nombre de prisonniers plus important que l’injection intraveineuse de drogues et pourrait bien constituer la première voie de transmission du virus du sida et de l’hépatite C derrière les barreaux.

Le problème est justement que, trop souvent, les détenus ignorent les mécanismes élémentaires de transmission, de prévention et de traitement des maladies virales. Souvent, ils ne bénéficient d’aucune couverture médicale avant leur mise sous écrou. Aux Etats-Unis, l’assurance-maladie est en effet tributaire du bon vouloir de l’employeur, qui l’offre à ses salariés en contrepartie d’une cotisation mensuelle prélevée sur le salaire. L’aide médicale gratuite, destinée aux indigents, exclut tout traitement visant la toxicomanie, les affections mentales et certaines autres maladies graves. […]

Megan Comfort, Le Monde Diplomatique, juin 2003.
Source : http://www.monde-diplomatique.fr/2003


Au cœur de la sanction, l’enfermement : Les Etats-Unis malades de leurs prisons

Selon les statistiques rendues publiques le 8 avril 2003 par le ministère de la justice, la France n’a jamais connu autant de détenus : 59 155 personnes sont incarcérées - pour 48 603 places ! - dans 185 établissements pénitentiaires. Caractéristique d’époques de crise économique, l’exigence sécuritaire se renforce, alimentée par les politiciens en quête de voix. L’année électorale 2002 a ainsi été marquée par une forte croissance de la population carcérale : du 1er septembre 2001 au 1er septembre 2002, le nombre de détenus a augmenté de 14 %. Accroissement de la durée d’emprisonnement, moindre recours aux réductions de peine et aux libérations conditionnelles, allongement de la détention provisoire, l’institution judiciaire évite la réflexion sur sa mission de réinsertion et les moyens d’éviter l’incarcération des personnes pour lesquelles elle est inutile ou nuisible (Lire « Le sens de la peine » et « Petites et grandes réformes »). Le gouvernement de droite a annoncé la création de 28 prisons d’ici à 2007 pour porter la capacité du parc pénitentiaire à 60 000 détenus. A ce rythme effréné, entendrait-on égaler le « modèle » américain ? On compte, aux Etats-Unis, près de deux millions de personnes incarcérées - 700 détenus pour 100 000 habitants. Mais cet emprisonnement de masse des pauvres pose plus de problèmes qu’il n’en résout.


Un adulte américain sur cent est en prison

Avec 2,3 millions de personnes incarcérées, 1% de la population américaine adulte se trouve derrière les barreaux. Un taux, révélé par le Pew Research Center, qui constitue à la fois un record dans l'histoire des Etats-Unis mais également dans le monde.
Le «International Herald Tribune» souligne que ce chiffre diffère de celui du ministère américain de la Justice qui est calculé sur l'ensemble de la population et non pas celle des adultes. Ainsi, selon le taux officiel, seul un Américain sur 130 est emprisonné.
Par comparaison, la Chine, avec une population de plus d'un milliard de personnes, arrive en deuxième position avec 1,5 million de prisonniers, suivie de la Russie avec 890.000 personnes détenues.
Sur la population globale, les Etats-Unis ont un taux de 750 détenus pour 100.000 adultes et enfants. A comparer avec un taux de 93 pour l'Allemagne et de 94,73 pour la France, selon les calculs de 20minutes.fr.

Tout le monde n'est pas égal face aux barreaux
Mais derrière ce chiffre emblématique de 1% se cache de fortes disparités ethniques. Alors qu'un adulte blanc sur 106 est incarcéré, c'est un hispanique sur 36 et un noir sur 15 qui sont en prison.
Le chiffre est encore plus frappant pour les classes d'âges inférieurs. Parmi les 20-34 ans, un noir sur neuf est derrière les barreaux.
Alors que les hommes sont dix fois plus susceptibles d'être emprisonnés que les femmes, la population carcérale féminine «progresse d'une manière beaucoup plus rapide» que celle des hommes, indique également le rapport de Pew. Mais là encore, les chiffres varient en fonction de la couleur de la peau. Ainsi, une femme noire sur 100 et une hispanique sur 297 sont en prison, contre une sur 355 femmes blanches.

Source : http://www.20minutes.fr, 2 mars 2008.

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